Décret n° 2025-252 du 20 mars 2025 relatif aux éléments constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi (ORE) (transposition d’une mesure issue de l’article 4 de l’accord relatif à l’assurance chômage du 14 novembre 2024 invitant les pouvoirs publics à prendre les actions nécessaires pour réviser la réglementation européenne concernant l’indemnisation des travailleurs frontaliers et à renforcer leur accompagnement).

Le décret vise à répondre à la réglementation européenne qui prévoit que les demandeurs d’emploi transfrontaliers sont indemnisés par leur pays de résidence, même s’ils ont cotisé dans un autre pays. Cette situation a entraîné un surcoût pour l’assurance chômage, en raison des salaires plus élevés dans les pays voisins et d’une durée de recherche d’emploi plus longue.

L’offre raisonnable d’emploi, dont les éléments constitutifs sont définis dans le contrat d’engagement, comprend la nature et les caractéristiques de l’emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu (article L. 5211-6-4 du Code du travail). Les refus répétés d’une offre raisonnable d’emploi (ORE) peuvent entraîner une suspension des droits à l’assurance chômage.

Dans ce contexte, le décret apporte deux précisions importantes à l’article R. 5411-15-1 du Code du travail :

  • la zone géographique privilégiée est délimitée au sein du territoire français.
  • le salaire attendu est désormais défini en cohérence avec le salaire normalement pratiqué pour l’emploi ou les emplois recherché dans cette zone, compte tenu, le cas échéant, de l’expérience du demandeur d’emploi. Pour les travailleurs transfrontaliers, ce sera donc désormais le salaire habituellement pratiqué en France qui sera l’un des éléments constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi et non plus les salaires pratiqués à l’étranger.

Les autres éléments de l’offre raisonnable à l’emploi restent inchangés.

Un communiqué du ministère du travail précise que l’accompagnement des demandeurs d’emploi frontaliers sera renforcé par les 19 agences France Travail qui accueillent près de 75% d’entre eux.

Décret n° 2025-290 du 28 mars 2025 relatif à l’abaissement du seuil d’exonération des cotisations salariales des apprentis : Ce décret du 28 mars 2025 vise à actualiser les dispositions réglementaires du Code du travail et précise que l’exonération en faveur des apprentis, portant sur la totalité des cotisations salariales d’origine légale et conventionnelle, s’applique désormais sur la part de leur rémunération inférieure ou égale à 50 % du SMIC en vigueur le mois considéré, contre 79 % auparavant. Le plafond d’exonération des cotisations salariales passe ainsi de 1 423 € (79 % du SMIC au 1er janvier 2025) à 901 € (article D. 6243-5 du Code du travail).

Cette nouvelle limite d’exonération concerne les contrats d’apprentissage conclus à compter du 1er mars 2025. Les apprentis dont le contrat a été conclu avant cette date continuent, quant à eux, de bénéficier de l’exonération des cotisations sociales dans la limite antérieure de 79 % du SMIC.

CONGÉS PAYÉS

Le manquement de l’employeur à ses obligations en matière de congés payés ne crée pas nécessairement un préjudice : En cas de manquement de l’employeur à son obligation de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit au congé payé, ce droit est soit reporté en cas de poursuite de la relation de travail, soit converti en indemnité compensatrice de congés payés en cas de rupture du contrat de travail. Selon la Cour de cassation, il en découle qu’un tel manquement n’ouvre pas, à lui seul, le droit à réparation automatique. Il appartient au salarié de démontrer l’existence d’un préjudice distinct, non couvert par le report ou le versement de l’indemnité compensatrice de congés payés (Cass. soc., 11 mars 2025, n° 23-16.415).

DURÉE DU TRAVAIL

La nullité de la convention de forfait jours n’entraine pas automatiquement un préjudice au salarié : Dès lors que le salarié a été soumis à une convention de forfait en jours en application d’un accord collectif dont les dispositions n’étaient pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail de l’intéressé, la convention de forfait en jours est nulle de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l’existence et le nombre. Il en découle qu’un tel manquement n’ouvre pas, à lui seul, droit à réparation et il incombe au salarié de démontrer le préjudice distinct qui en résulterait (Cass. soc., 11 mars 2025, n° 23-19.669).

SANTÉ ET SÉCURITÉ

L’absence de suivi médical pour les travailleurs de nuit n’engendre pas à elle seule un préjudice : Le manquement de l’employeur à son obligation de suivi médical pour le travailleur de nuit n’ouvre pas, à lui seul, droit à réparation. Il incombe au salarié de démontrer le préjudice résultant de ce manquement afin d’en obtenir la réparation intégrale. Pour justifier sa décision, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle qu’il existe des garanties et des sanctions alternatives aux dommages-intérêts, telles que la visite d’information et de prévention préalable à l’affectation du salarié sur un poste de nuit, ainsi que des amendes en cas de violation des dispositions relatives au travail de nuit (Cass. soc., 11 mars 2025, n° 21-23.557).

LICENCIEMENT

Les avantages en nature, dont le véhicule de fonction, ne sont pas maintenus pendant le congé de reclassement excédant le préavis : Lorsqu’un salarié est en congé de reclassement, au cours de la période excédant la durée de son préavis, il ne peut pas prétendre au maintien des avantages en nature dont il bénéficiait durant le préavis, mais seulement au versement d’une rémunération versée par l’employeur égale à l’allocation de conversion, c’est-à-dire au moins égale à 65% de sa rémunération mensuelle brute moyenne sur laquelle ont été assisses les contributions au régime d’assurance chômage au titre des 12 derniers mois précédant la notification du licenciement (Cass. soc., 12 mars 2025, n° 23-22.756).

Le fait pour un salarié de porter atteinte à la santé psychique d’une autre salariée après une rupture amoureuse peut justifier un licenciement pour faute grave : Le comportement, sur le lieu et le temps de travail, du salarié dans une position hiérarchique élevée, dans le but d’obtenir une explication en raison d’un possible dépit amoureux ou aux fins d’entretenir une relation malgré le refus clairement opposé par une collaboratrice, peu important qu’elle ne soit pas sous sa subordination directe, constituait un manquement à ses obligations découlant du contrat de travail, incompatible avec ses responsabilités et qu’une telle attitude, de nature à porter atteinte à la santé psychique d’une autre salariée, rendait impossible son maintien au sein de l’entreprise. Cet arrêt illustre le principe selon lequel le manquement d’un salarié à son obligation de sécurité envers un collègue peut justifier un licenciement pour faute, même lorsqu’il s’agit d’un fait lié à sa vie personnelle (Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-17.544).

Un employeur ne peut pas se prévaloir de sa propre négligence pour fonder le licenciement d’une salariée sans diplôme : Une salariée, préparatrice en pharmacie, a été licenciée par son employeur pour absence de diplôme après dix ans d’ancienneté. La Cour de cassation a considéré que la société, ayant poursuivi les relations contractuelles durant plusieurs années avec une salariée sans vérifier que cette dernière disposait de la qualification nécessaire à l’emploi de préparatrice en pharmacie légalement exigée, ne peut pas invoquer une réglementation à laquelle elle avait elle-même contrevenu et se prévaloir de sa propre négligence pour reprocher à la salariée une faute grave (Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-21.414).

DROIT À LA PREUVE

Le droit à la preuve peut justifier le recours à des témoignages anonymisés : Si, en principe, le juge ne peut fonder sa décision uniquement ou de manière déterminante sur des témoignages anonymes, il peut néanmoins prendre en considération des témoignages anonymisés, c’est-à-dire rendus anonymes a posteriori afin de protéger leurs auteurs mais dont l’identité est néanmoins connue par la partie qui les produit, lorsque sont versés aux débats d’autres éléments aux fins de corroborer ces témoignages et de permettre au juge d’en analyser la crédibilité et la pertinence. En l’absence de tels éléments, il appartient au juge, dans un procès civil, d’apprécier si la production d’un témoignage dont l’identité de son auteur n’est pas portée à la connaissance de celui à qui ce témoignage est opposé, porte atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le principe d’égalité des armes et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte au principe d’égalité des armes à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi (Cass. soc., 19 mars 2025, n° 23-19.154).

INAPTITUDE

En cas de licenciement pour inaptitude, la contestation de l’avis médical n’interrompt pas la procédure de licenciement : La rupture du contrat de travail fondée sur un avis d’inaptitude régulièrement émis par le médecin du travail n’est pas subordonnée à la décision préalable du Conseil de prud’hommes sur le recours formé contre cet avis. Autrement dit, l’employeur peut engager et poursuivre la procédure de licenciement sans attendre l’issue de cette contestation (Cass. soc., 19 mars 2025, n° 23-19.813).

REPRÉSENTATION DU PERSONNEL

Le juge judiciaire peut prononcer la nullité du licenciement d’un salarié protégé en dépit de l’autorisation administrative de licenciement : Si le juge judiciaire ne peut, en l’état de l’autorisation administrative accordée à l’employeur de licencier un salarié protégé sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, il reste, cependant, compétent pour apprécier les fautes commises par l’employeur pendant la période antérieure au licenciement et notamment le non-respect par l’employeur des dispositions des articles L. 1226-7 et L. 1226-9 du Code du travail en l’absence de visite de reprise après l’arrêt de travail pour cause d’accident du travail. Il résulte de cet arrêt que l’absence de visite médicale de reprise après un accident du travail peut entraîner la nullité du licenciement, malgré l’autorisation de l’inspection du travail (Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-12.790).